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Commerce

Frais de scolarité école de commerce : l’excellence a-t-elle un prix (astronomique) ?

16.02.2024
Ecoles Post-Bac

Neoma, EM normandie ou encore Kedge, HEC ou ESSEC... Ces grandes écoles de commerce ont toutes en commun de préparer à des carrières florissantes et très rémunératrices, mais également d'avoir augmenté drastiquement leurs frais de scolarité depuis ces dernières années. Comprendre les tendances d'augmentation des frais de scolarité peut permettre de gérer une planification financière, rendre l'éducation plus accessible et assurer que les écoles soient transparentes sur leurs coûts. Mais une question reste en suspens, comment expliquer cette augmentation et comment les écoles justifient-elles de tels frais de scolarité ? Tour d'horizon, analyse des tarifs et perspectives d'avenir des écoles de commerce en France.

Des frais de scolarité en hausse exponentielle

Ces tendances révèlent une dépendance significative à l'inflation, comme mentionné dans les prévisions des écoles dès 2022. Cette inflation impacte principalement deux facteurs : les charges et les salaires, qui représentent ensemble une part importante du budget des écoles.

Citons par exemple :

  • HEC Paris a augmenté ses frais de scolarité de 20 450 euros pour passer de 41 250 euros en 2015 à 61 700 euros en 2023
  • ESCP a fait monter ses frais de scolarité de 20 890 euros pour passer de 39 000 euros en 2015 à 59 650 euros en 2023
  • ESSEC a augmenté le coût de sa scolarité de 20 650 euros pour passer de 40 500 euros en 2015 à 61 390 euros en 2023

Les raisons invoquées

Outre les frais de fonctionnement (salaires, charges liées à l'exploitation des infrastructures ...) qui ont suivi la hausse de l'inflation, les écoles ont consenti à d'importants investissements ces dernières années, notamment dans des dispositifs digitaux pour répondre aux besoins d'apprentissage à distance et dans la rénovation ou l'acquisition de nouveaux campus. A titre d'exemple, l' Emlyon a dépensé plus de 100 millions d'euros pour la construction de nouveaux campus en centre-ville et HEC Paris prévoit une rénovation majeure de son campus historique à Jouy-en-Josas.

Le désengagement de l'État

Depuis une dizaine d'années, une partie des financements avancés par la Chambre de Commerce et d'Industrie, a été abandonné. Entre 2018 et 2022, 400 millions d'euros ont été soustraits aux budgets des CCI. Mécaniquement, les dotations des écoles ont donc baissé. La CCI Paris-Ile-De-France fut la plus impactée : en 2022, aucune subvention n'a été accordée à HEC, l'ESSEC et l'ESCP. Les écoles de commerce se sont donc tournées vers d'autres moyens de financements.

Rester en tête … à tout prix

Si les directeurs d'école sont libres de fixer le montant de leurs frais de scolarité, en réalité, ils obéissent à quelques règles. Les investissements engagés permettent aux écoles de bénéficier d'un meilleur classement, ce qui entraîne généralement d'une meilleure visibilité et d'une réputation plus forte ... et donc d'attirer davantage de candidats. Leurs prix sont également ajustés en prenant compte des évolutions observées chez les écoles concurrentes, mais aussi de leur position dans les classements. « Les écoles les mieux classées sont celles qui coûtent le plus cher, et inversement », remarque un directeur d'école. Les business schools françaises sont d'ailleurs parmi les plus coûteuses d'Europe, avec les britanniques.

Un frein à la poursuite d'études

Selon une enquête menée par OpinionWay pour Kedge BS, près de la moitié des jeunes interrogés considèrent que le coût des frais de scolarité est le principal frein à la poursuite de leurs études dans ces écoles. Les montants élevés affichés pour la rentrée, contribuent à renforcer ces difficultés, d'autant plus que les coûts de la vie étudiante continuent également d'augmenter.

Face à cette pression financière, les étudiants et leurs familles doivent souvent recourir à diverses stratégies de financement, telles que l'emprunt, les bourses, l'alternance, les jobs étudiants ou encore l'entrepreneuriat, pour assumer ces frais sans s'endetter excessivement.

Pour Yasmine Debbache, 23 ans, c'était l'apprentissage ou rien. "Je n'aurais jamais pu intégrer une école sans ça. Il était hors de question que je débute ma vie d'adulte en étant endettée", confirme la jeune femme, apprentie en région parisienne chez Webhelp, spécialiste de l'externalisation client. Elle est aujourd'hui en dernière année de programme grande école à Kedge Business School, après avoir suivi sa troisième année de licence à Skema BS, elle aussi en apprentissage. Une formule qui lui a permis de voir ses frais de scolarité totalement pris en charge tout en se professionnalisant et en touchant une rémunération plus importante qu'en stage.

Stratégies et réponses des écoles de commerce

Face à l'augmentation des frais de scolarité, les écoles de commerce mettent en œuvre diverses stratégies pour atténuer l'impact financier sur les étudiants. Parmi ces mesures, on retrouve la mise en place de programmes de bourses visant à soutenir financièrement les étudiants. Ces efforts témoignent de l'engagement des écoles de commerce à offrir des opportunités équitables à tous les étudiants, indépendamment de leur situation financière. Ces bourses sont souvent attribuées sur la base du mérite académique, des besoins financiers ou d'autres critères spécifiques. Par exemple, l'école EM Normandie offre une bourse d'excellence, réduisant de 30 % les frais aux étudiants boursiers qui obtiennent lors de leur année précédente une moyenne supérieure à 14/20 ou encore les frais de scolarité fondés sur le revenu des parents tel que le font déjà TBS Éducation ou l'ESSCA.

L'exemple de la fondation HEC

Depuis 2009, les frais de scolarité des étudiants boursiers sociaux sur critères CROUS sont intégralement ou partiellement pris en charge par la Fondation HEC. Cette mesure de financement a eu un impact spectaculaire sur la part de boursiers CROUS à HEC, passant de 5% en 2009 à 15% en 2019. Au sein du programme Grande École, 18% bénéficient d'une aide financière de la Fondation HEC sur critères sociaux. Objectif de la première école de commerce en France : passer à 25% de boursiers tout en maintenant les critères d'excellence.

Commencer à travailler avec des dettes à gérer

Les étudiants qui s'inscrivent dans des écoles de commerce avec des frais de scolarité plus élevés peuvent être contraints de contracter des prêts importants, entraînant une dette étudiante accrue à la fin de leurs études. Une enquête a été menée par le Bureau national des étudiants en école de management en 2022, auprès de 3 800 étudiants, révélait que 57 % d'entre eux s'étaient endettés pour rejoindre des écoles de commerce délivrant des diplômes reconnus par le ministère de l'enseignement supérieur. Ces enjeux soulignent l'importance de trouver des solutions pour rendre l'éducation supérieure plus accessible et inclusive, afin de promouvoir l'égalité des chances et la diversité au sein de l'enseignement supérieur.